Depuis mi octobre 2017, une partie de la rue du Marché offre un spectacle de plus en plus désolant : en effet après la fermeture définitive de la blanchisserie depuis plus de trois ans, celle de la
bijouterie depuis l’an dernier, vient maintenant s’ajouter la fermeture d’une charcuterie. Sans parler de la fermeture plus ancienne d’autres commerces telle la quincaillerie-matériel électrique-TV.
La désertification des centres villes avec la concurrence des grands centres commerciaux est une tendance bien connue et générale en France depuis plusieurs années. La situation à Châtelaillon, grâce notamment à ses marchés, ses animations périodiques et son attraction touristique estivale n’est certes pas encore aussi catastrophique que dans d’autres petites villes de taille comparable.
Mais nous nous posons la question fort légitime de savoir si la majorité municipale a réellement pris conscience de cette tendance inquiétante de voir certains petits commerces de proximité fermer l’un après l’autre, alors qu’ils sont si indispensables pour répondre aux besoins quotidiens des résidents à l’année.
On pourrait objecter qu’il s’agit d’un domaine du privé, d’une évolution inéluctable où les pouvoirs publics ne peuvent intervenir. Or, ce n’est certainement pas le cas et les municipalités disposent de plusieurs outils pour revitaliser leur centre ville.
La lecture du « Guide du Commerce de Centre-Ville » est très instructive à cet égard. Ce guide publié en 2015 par le Conseil du Commerce de France précise dans son chapitre « Éviter les friches commerciales » :
« Les friches commerciales sont un phénomène symptomatique du délitement des commerces de centre-ville : elles font état d’un vide commercial progressif de certaines rues, donnant aux passants un sentiment d’abandon et pénalisant de fait l’attractivité d’un centre-ville. Pour éviter l’émergence de ce phénomène, la mairie doit jouer un rôle de prévention pour identifier les commerces vides ou en fin d’activité. Elle dispose par ailleurs de plusieurs outils pour lutter contre les friches commerciales identifiées : … promotion des « boutiques-test », …habillage des vitrines vides…, fiscalité locale avec taxe sur les friches commerciales… »
Ce guide propose également, entre autre, de recenser les besoins de la population, d’organiser un plan de déplacement urbain favorable au commerce, de missionner et former un chargé du commerce, de favoriser la transmission des commerces. Il préconise également que la mairie ait recours au « droit de préemption commercial qui s’applique notamment aux fonds de commerce et aux baux commerciaux après définition préalable d’un périmètre de sauvegarde du commerce de proximité, dont l’étendue, le contour ou la superficie sont laissés à la libre appréciation du conseil municipal … ».
Il mentionne également la possibilité pour les municipalités de recourir à plusieurs sources et dispositifs de financement tel le FISAC (Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce).
Faut-il ajouter que l’agglomération de La Rochelle, dans le cadre de sa stratégie commerciale 1016-2020 a choisi la préservation des centres villes comme l’un des 6 axes forts retenus et qu’enfin, au niveau communal, le Plan Local d’Urbanisme pour Châtelaillon préconise de « Renforcer la concentration des commerces et services dans le centre balnéaire ».
On voit donc que les dispositifs et les moyens ne font pas défaut mais sont-ils réellement utilisables et utilisés ?
La réponse est incontestablement positive car le territoire national fourmille d’initiatives prises par de très nombreuses mairies qui ont la volonté politique de lutter contre le développement des friches commerciales dans leur centre ville. Sans que le succès complet soit toujours au rendez-vous, les municipalités ayant pris ce problème à bras le corps ne manquent pas, comme par exemple Houdan, petite commune de 3500 habitants des Yvelines, Cran-Gevrier (17 000 habitants) en Haute Savoie, Saint Brieuc en Bretagne, Dax ou encore plus près de nous Saint-Jean-d’Angely.
En effet dans ces communes, l’un ou l’autre des dispositifs suivants a été appliqué :
• application d’une augmentation de 20 % des impôts fonciers pour locaux abandonnés,
• recherche active de porteurs de projet,
• mise en place d’un droit de préemption sur les murs et fonds commerciaux-protection des « linéaires commerciaux »,
• préemption effective considérant que l’effort financier représente un investissement rentable sur le moyen à long terme,
• octroi de prêts d’honneur et de prêts croissance sans garantie, ni caution, ni intérêt,
• accompagnements personnalisés gratuits,
• octroi de loyers peu élevés,
• arrêt de l’installation de nouvelles agences bancaires et immobilières.
Enfin, autre exemple où dans notre région, l’Établissement public foncier de Nouvelle-Aquitaine aide actuellement Cognac à investir 6 millions d’euros dans son centre-ville pour le portage financier, l’appui technique et juridique d’opérations visant à enrayer la perte d’attractivité de son centre ville.
Il convient de noter également qu’une politique de soutien du petit commerce de proximité est en totale cohérence avec nos propositions maintes fois affirmées de favoriser la construction de logements abordables, non spéculatifs, en locatif à l’année afin d’amener une population jeune et des familles avec enfants. Car s’il y a trop de logements vacants en centre ville (résidences secondaires, logements de tourisme), le commerce de proximité a du mal à fonctionner.
Face à cette panoplie d’outils et ces quelques exemples, que fait la majorité municipale de Châtelaillon ? La question mérite d’être posée .
Merci d’avance à la municipalité d’entendre cet appel et de ne pas laisser cette fermeture se transformer en une nouvelle et réelle friche commerciale.
Une réflexion sur “Trois commerces sans repreneurs : quel avenir pour la rue du Marché ?”